7. Le chant – (Sept lueurs)
Vous, chairs de braise ;
Les âmes du bûcher ;
Vous, de feu.
Sans corps, le souffle du désir ;
Votre désir, silencieux,
Dans leurs pures lueurs.
Je connais le coït
Encore comme la douce résurgence
Et l’amertume argentée.
Je connais l’écaille du coït,
Le premier et dernier cri de ce monde,
Le seul de ton récit.
Ah ! Ah ! Ah ! Tu ne sais pas ?
3 fois 3 fois 3 !
Ah ! Patiente. Attends.
Est-ce d’une ferme volonté
Que tu as inventé – l’existence ?
Avance, avance !
Trois femmes enceintes.
Trois fois le nom du défunt.
Trois sacrifices pour mise en terre.
Vingt-sept pour l’invisible musique au-delà –
Vingt-sept pour Sérapis.
Vingt-sept bonshommes de paille
Qui brûlent au contact de l’eau.
L’humanité à la mer.
Luisant, le plus ancien
Comme l’éclat ultime,
Le vieux serpent, le vieux serpent.
Nous n’avons pas,
Jamais eu l’usage
De ce que nous sommes, ce que nous devenions.
Midgard
Le Serpent
Le Serpent
Le vieux serpent
Qui enserre lentement
Le monde dans la rétine, Ô Lune !
Le vieux serpent, l’ancien des runes,
Qu’aucun général ne saura vaincre,
Pas même sous le lac le dieu de foudre.
À la calme altitude
Des cimes déchirées
Contre
Il n’y aura qu’à mesure
La hauteur à revers,
La saillie de l’élan.
Viendra ce temps,
L’écaille humide,
Le chant du serpent.
Que tu pousses aussi loin
Que l’oiseau s’élève,
Au sillage de l’envol.
Accueille-nous, Ô Nuit sans mesure !
Guide notre éclair dans son galop !
Sauve la froide nuit d’Europe !
Créée, lamentée, difficile,
Qu’à l’aube nous lançons
Parmi l’ardent vacarme
Parmi les forêts pourpres
Que les enfants gravissent.
Nuit ! Minuit !
Seconde nuit ! Autre
Monde ! L’Autre Monde !
[Silence]
Le gardien de la porte
A l’œil percé,
Sa paupière fendue ;
L’œil percé,
La paupière fendue ;
Ici, allez, ici ;
Les mers qui se brisent,
L’écume qui s’étale,
À jamais les naufrages ;
La lettre, canicule, l’épicentre,
L’exacte libellule – banquises vagabondes,
La soif aride et brûlante ; à travers la vie ;
Ô Terre ! Ô Sein de la terre !
Ton fruit, ton breuvage !
Qu’en deux, nous fendons, chevauchée,
Chevauchée, chevauchée !
Terre ! Terre ! Terre ! Au bout du monde !
Vaste vie ! Vaste élan ! Vaste queue !
Ventre intime ! L’étendue ! Capture !
Mer ! Mer ! Océan ! Au bout du vent !
Saisir ton rebord, presser au bord – ouvert,
Le jardin, les veines, ton ivre qui-vive !
Ô douce absence
Que nous inscrivions
Dans la transcendance de la pluie ;
Je te signale à l’astre
Et que fertile ton sang s’imprègne,
Se répète, se répète, noircisse plus obscures
toutes les nuits qui saillirent.
[Silence ; puis transition vers le second espace]
8. Exode – (Deuxième espace)
(Les sept lueurs sont rassemblées ; chaque lueur est soufflée progressivement. « Monde en feu » : la huitième lueur est allumée, dernière lueur ; «
Hélas, le jour point dans la ceinture magique de ses
Sentier de guerre – le gouffre, au massacre les dieux.
Le serpent de Midgard, ses puissantes convulsions.
Thor, l’imparable marteau de foudre, en cet éclair.
Le dernier combat. Le souffle des cimes. Jour incendié.
Le grand serpent, enserrant le monde, à se mordre
Ecoute la mort de Thor ; étranglé,
il chancelle. Il s’effondre. Etouffe
sous le serpent.
Un astre tout à coup, énorme, avalant tout :
cauchemars, cadavre, dieux et serpent.
Monde en feu.
Hélas.
L’invisible feu.
La nuit.
(Quelqu’un est-il venu ce soir ?)